Chapitre 6 : Comment se connecter au réel ? Se connecter à soi
Comment se connecter au réel ? Il convient avant tout de souligner, qu'en toute rigueur, nous ne nous y connectons jamais totalement. En effet, nous n'y accédons qu'à travers nos représentations subjectives qui sont, fondamentalement, fictives, et donc pas réelles. Au même titre qu'une carte qui représente un territoire n'est pas le territoire, que le tableau de Magritte qui représente une pipe n'est pas une pipe, nos représentations du réel ne sont pas le réel. Elles sont objectivement réelles en tant que représentations à l'instar du tableau qui est réel en tant que tableau ou de la carte qui existe objectivement en tant que carte, mais elles ne sont pas le réel qu'elles représentent. Nous ne nous connectons jamais totalement au réel, la seule chose que nous pouvons faire, c'est de nous assurer que la représentation que nous nous en faisons coïncide au plus près avec la réalité de ce qui est.
Cette distinction entre réel et représentation du réel est fondamentale, et l'ignorer nous expose, nous l'avons vu, à de grandes déconvenues, de douloureuses déceptions, voire de graves dangers.
Que faire pour nous en prémunir ?
La première chose à faire, c'est d'en prendre conscience. J'espère que ce que vous avez lu jusqu'à présent y contribue.
La deuxième chose à faire, c'est de développer une hygiène de vie, en l'occurrence une hygiène émotionnelle et mentale, qui va nous aider à ne pas (trop) prendre des vessies pour des lanternes, une hygiène de présence, de conscience et d'attention juste qui va nous aider à ne pas tomber dans les pièges de nos illusions, de biais cognitifs et de mécanismes de protections qui nous rendent aveugles à certaines choses et nous en font voir d'autres qui n'existent pas.
Puisque se connecter au réel est impossible, nous pourrions reformuler la question en "Comment porter une attention juste aux choses ?", juste signifiant ici "au plus proche de ce qu'elles sont". Autrement dit, comment faire en sorte que mes représentations subjectives coïncident avec la réalité objective, que les représentations que je me fais de moi-même et du monde qui m'entoure correspondent à la réalité de ce qui est.
Commençons par "soi-même" !
Comment se connecter à soi-même ?
Plus précisément, comment accéder à la réalité de ce que je suis ? De qui je suis ?
Nous avons au chapitre précédent identifié une ligne directrice nous permettant de répondre à ces questions fondamentales : j'accède à la réalité de qui/ce que je suis à travers la réalité de ce que je vis et comment je le vis. Nous allons à présent détailler une démarche, un processus, une méthode qui permet concrètement et pratiquement de faire ce travail.
Cette méthode repose sur mon expérience personnelle et professionnelle. Elle détaille un exercice pratique proposé au chapitre 4 de mon premier livre, Lâcher prise, comment se reconnecter à soi-même. C'est l'exercice le plus puissant du livre et il a toute sa place ici où il s'agit de faire la part des choses entre réalité et fiction, entre carte et territoire, entre réel et représentation. Cette méthode, que j'appelle "décryptage", consiste à prendre la mesure de ce que l'on vit, à identifier des signaux sur le tableau de bord de notre vie et à en décrypter les messages. C'est ainsi que l'on peut mettre en lumière les éléments de réalité de ce que l'on est.
En effet, à l'image du tableau de bord d'un véhicule dont les signaux nous informe du bon fonctionnement ou du dysfonctionnement d'un véhicule, nos réactions nous donnent des indications sur la façon dont nous sommes en train de faire l’expérience de notre existence. Nos émotions, nos sensations, nos réactions physiologiques et comportementales sont de précieux indicateurs sur la façon dont nous réagissons à la situation que nous sommes en train de vivre. Ils nous aident à prendre les dispositions qui vont nous permettre de poursuivre l'expérience sensible de notre existence, le voyage pour le véhicule, dans les meilleures conditions possibles.
La sensation de froid nous invite à nous couvrir car si notre température descend en dessous de 37 degrés, notre corps, le véhicule de notre existence, ne va pas fonctionner correctement. De la même façon que le voyant de la température du moteur qui s'allume nous invite à vérifier le bon fonctionnement du circuit de refroidissement du moteur de la voiture, si nous avons trop chaud ou trop froid, nous sommes invités à prendre des dispositions pour maintenir la température de notre corps à un niveau fonctionnel optimal.
Si nous saisissons un objet brûlant dans la cuisine, la sensation, ici la douleur ressentie, nous pousse à lâcher l'objet immédiatement, d'autant plus rapidement que l'intensité de la douleur est grande. Sans cette sensibilité, ces signaux sur le tableau de bord, nous nous exposons au risque de nous blesser, parfois gravement.
C'est ce dont souffrent les personnes atteintes d'analgésie congénitale, maladie génétique incurable qui rend les personnes qui en sont atteintes très vulnérables. Ne ressentant aucune douleur, cela les expose au risque de se blesser en se brûlant, en se mordant la joue, ou même en se fracturant un membre sans même s'en rendre compte.
J'en ai fait moi-même l'expérience à la suite d'un soin dentaire. L'anesthésie locale prodiguée par le dentiste a duré plus longtemps que prévu, jusqu'à l'heure du déjeuner. En mangeant une salade, j'ai un goût étrange de sang dans la bouche. J'arrête tout de suite de manger car je réalise que j'étais en train de me manger la joue. C'est bien de manger des protéines, mais mieux vaut éviter de manger les siennes.
Autre situation qui, cette fois-ci, a bien failli me coûter la vie, c'est la crise d'appendicite qui n'a pas été détectée aux urgences de la clinique dans laquelle je m'étais rendu en pleine nuit, et de laquelle je suis sorti avec de puissants analgésiques. Grâce aux effets anesthésiant la douleur, j'ai pu dormir et me reposer, jusqu'à ce que 30 heures plus tard, cela se transforme en péritonite gangrenée. Si vous lisez ces mots, c'est que, bien évidemment, ayant été opéré à temps, j'y ai survécu. J'ai depuis une immense gratitude pour le corps médical, ces femmes et ces hommes qui œuvrent dans les hôpitaux en général, et à l'hôpital Saint José de Lisbonne en particulier. De l'aide soignant à la chirurgienne (j'ai été opéré par une femme), ils m'ont littéralement sauvé la vie.
Prendre en compte un signal est bien sûr très important. Le décrypter l'est tout autant. Les douleurs abdominales et autres symptômes n'ont pas été décryptés correctement à la clinique dans laquelle je me suis rendu, les mesures prises n'étaient pas adéquates, mon état s'est aggravé. C'est grâce au scanner fait le lendemain à l'hôpital que l'on a pu faire le nécessaire : une heure plus tard, j'étais sur la table d'opération.
Ainsi, nos réactions, nos sensations, nos émotions constituent les indicateurs du tableau de bord de notre vie. Nous l'avons vu précédemment, nos réactions nous appartiennent à 100%. Donc tout ce que nous vivons nous parle de nous-même. Un peu comme si chaque expérience vécue nous montre, démontre, expose, explique, alerte, donne un message/un éclairage de ce que nous sommes, de ce qui en soi nous fait réagir et nous comporter comme nous le faisons. Encore faut-il prendre la mesure des signaux et décrypter les messages de façon claire et intelligible.
Concrètement, comment faire ?
Je vous propose une approche simple et pragmatique pour aborder et dénouer des situations complexes et subtiles. Elle se décompose en deux parties qu'il convient de faire l'une après l'autre, la première étant ce qui va constituer la base de travail de la deuxième.
Prendre une photographie
La première étape consiste à faire une photographie des éléments de réalité objective, à savoir les faits liés à un événement précis (la situation, le contexte, ce qui s'est passé, ce que nous avons vu et entendu) et la façon dont nous avons vécu cet événement (nos sensations, nos émotions, nos pensées).
Pour pouvoir s'appuyer sur des éléments factuels fiables, il est important de s'en tenir à un événement spécifique clairement identifié dans le temps, et non pas une généralisation de situations récurrentes. Ce travail de décryptage doit impérativement se faire sur la base d'éléments de réalité les plus précis et objectifs possible.
Ce qu’il s’est passé, les faits
Décrire la situation consiste à décrire les faits, ce qui s'est passé, ce que nous avons vu et entendu.
Prenons un exemple pour illustrer l’ensemble du processus. La description des faits peut se formuler de la façon suivante :
On veillera dans la description des faits à distinguer ce qui a été observé de ce qui a été interprété, supposé, extrapolé, déduit, jugé ... en faisant précéder les descriptions de la mention "j'ai interprété, j'ai supposé, j'ai extrapolé, j'ai déduit, j'ai jugé ..."
Reprenons la description ci-dessus et corrigeons-en la formulation :
De l'importance de prendre notes sans délai
La description des faits relève de notre perception d'une part, et de la façon de nous raconter l'histoire d'autre part. Un même événement vécu par deux personnes différentes donnera deux histoires différentes. D'une part parce qu'elles observent la scène d'un point de vue différent, mais aussi et surtout, parce qu'elles se représentent ce qu'elles perçoivent de façon différente. Rappelez-vous, nous ne voyons pas le monde tel qu'il est, nous le voyons tel que nous sommes.
Bien-sûr, nous allons dans la plupart des cas être d'accord sur les faits. Mais il arrive parfois que les deux témoins d'un même événement soient en total désaccord. D'autant plus que nous différons dans le temps le moment où l'on cristallise ce qui s'est passé, les faits, soit sur papier, soit dans notre mémoire en se remémorant la scène.
En effet, nous avons tous une mémoire sélective, biaisée par une multitudes de paramètres, ce qui immanquablement altère la fiabilité de l'histoire que nous nous racontons. Autrement dit, plus nous attendons, plus le récit que nous faisons de ce que nous avons vécu risque de s'éloigner de la réalité objective de ce qu'il s'est réellement passé. C'est la raison pour laquelle il est préférable de prendre note au plus près de l'évènement pour faire ce travail de décryptage.
Comment j’ai vécu ce qu’il s’est passé
Décrire la situation, c'est aussi décrire la façon dont nous l'avons vécue dans notre corps, notre coeur (émotionnellement) et notre tête (mentalement).
Dans mon corps :
Décrire comment nous le vivons dans notre corps, c'est relever nos sensations physiques, nos réactions physiologiques, et nos comportements.
Exemples de sensations physiques : tensions, douleurs, larmes, chaud, froid, picotement, tremblements ...
Exemples de réactions physiologiques : coeur qui bat, transpiration, gargouillement, nausée, ...
Exemples de comportements : cris, pleurs, fuite, taper du poing sur la table, claquer une porte, …
Dans mon coeur :
Décrire comment nous le vivons dans notre coeur, c'est lister toutes les émotions ressenties en essayant de trouver le mot le plus juste.
Joie, peur, colère, tristesse, dégoût, honte, culpabilité, mépris, ...
Pour vous aider à identifier le mot le plus pertinent pour nommer votre émotion, consultez les cartes mémo "Développer sa conscience émotionnelle'' disponible sur le blog du livre. Consultez en particulier les cartes n°2 Les émotions et n°9 Les émotions et leurs synonymes.
Dans ma tête :
Il s’agit là de prendre note des pensées et des discours intérieurs que nous avons eus pendant l'évènement. Il convient de veiller à identifier et à distinguer les interprétations, suppositions, jugements, déductions, extrapolations, projections, …
Cette première étape consiste donc à prendre une photographie de ce qui s'est passé et de veiller à ce que celle-ci soit la plus fidèle, la plus descriptive et la plus précise possible par rapport à la réalité de l'événement tel qu'il s'est effectivement déroulé.
Décrypter et prendre la nourriture
La deuxième étape, celle du décryptage à proprement parler, consiste à identifier sur la base des éléments de la première partie ce qui, en soi, a été touché, affecté, contacté, activé ... Cela peut être une blessure, un conditionnement, un héritage, un mécanisme de protection, une aspiration profonde …
Reprenons l’image du tableau de bord. Si dans votre voiture s'allument à la fois les voyants relatifs au niveau de carburant dans le réservoir, à la fermeture des portes et à l’enclenchement de l’attache de votre ceinture de sécurité, vous devez traiter chacun de ces signaux. Une information spécifique est donnée par chaque voyant allumé, lequel s’éteindra dès qu’une mesure adéquate sera prise pour régler le problème signalé par le voyant du tableau de bord.
Il ne vous viendrait pas à l’idée d’aller à la station service à cause du voyant “Portière mal fermée”, ni de vérifier que toutes les portes sont bien fermées si “Attachez votre ceinture de sécurité” est allumé. A moins que vous ne fassiez une erreur d'interprétation du message, un mauvais décryptage du signal. Auquel cas, agacé par l’inefficacité des mesures prises, vous pourriez en conclure que c’est le tableau de bord qui a un problème, ce qui pourrait vous amener à retirer l’ampoule du voyant pour ne plus être dérangé par le signal qui, selon votre interprétation, s'allume intempestivement.
Cette étape du décryptage est donc essentielle pour prendre les mesures les plus appropriées et efficaces dans notre vie. Les voyants du tableaux de bord de notre voiture nous informent sur le fonctionnement du véhicule, ce qui le constitue et comment il fonctionne. Nos réactions émotionnelles, physiques et comportementales nous informent sur notre propre fonctionnement, ce qui nous constitue, ce qui est sensible, ce qui est touché, ce qui se joue et s’active en soi.
Rappelez-vous (voir chapitre 5 page XXX), mes réactions me parlent de moi-même. J'accède à la réalité de ce que je suis à travers la réalité de ce que je vis et de comment je le vis.
En faisant la photographie de ce que nous vivons, nous décrivons “la réalité de ce que je vis et de comment je le vis”. Le décryptage consiste à mettre en lumière “la réalité de ce que je suis”.
La charnière entre la réalité de ce que je vis et celle de ce que je suis, entre la première et la deuxième partie de ce processus, ce sont les déclencheurs.
Déclencheurs - les étincelles
Les déclencheurs constituent les traits d'unions entre les éléments de réalité extérieure "visibles" liés à ce qui s'est passé et les éléments de réalité intérieur "invisible", ce qui en soi a provoqué nos réactions. Les questions à se poser pour les identifier sont :
Qu'est ce qui, dans ce qui s'est passé, a déclenché ma réaction ? Quelle étincelle à mis le feu émotionnel en moi ? Quel détonateur a fait exploser la bombe réactionnelle de mon comportement ?
Par exemple :
Chaque réaction est un signal qui transmet une information. Il convient donc de faire ce travail pour chaque émotion, sensation, comportement. Il convient de tirer les fils un par un pour identifier la nature et surtout le message transmis par le signal. Certaines situations, pas forcément complexes, provoquent un feu d'artifice de réactions physiques et émotionnelles qui font ressembler le tableau de bord de notre vie à un sapin de Noël. Ça clignote un peu partout. Faire face efficacement à ce genre de situation nécessite de faire la part des choses, de prendre en compte et de traiter chaque signal pour pouvoir retrouver un mode apaisé de fonctionnement, sans les flashs et les bourdonnements des signaux d'alarme.
Cette étape d’identification des déclencheurs est cruciale car elle permet d’ancrer tout le travail de décryptage dans le réel. Elle nous permet également d’y revenir si nous partons dans des élucubrations hors-sol lorsque, angoissé par la perte de contrôle, nous cherchons frénétiquement à comprendre ce qui nous arrive.
La peur nous pousse à nous mettre en sécurité, à réduire l’incertitude, à comprendre et à contrôler. Donner du sens aux situations et à nos réactions nous donne l’illusion de reprendre le contrôle sur la situation, de reprendre la télécommande de soi-même. Mais si le sens est déconnecté de la réalité, les boutons de la télécommande ne seront pas opérationnels. Pire, ils peuvent provoquer des réactions qui aggravent la situation.
Ancrer notre démarche dans le réel constitue en quelque sorte un garde fou et nous évite de tomber dans les pièges qui nous font attribuer à tort des causes irréelles à des effets qui eux le sont bel et bien, réels.
Ainsi, l'identification précise des déclencheurs est très importante et très utile pour la suite du processus. Cela nous aide à mettre en lumière de façon beaucoup plus fiable les réelles causes de nos réactions, les produits inflammables qui ont provoqué les feux émotionnels qui nous consument de l’intérieur. De la qualité de cette étape dépend la fiabilité de ce qui va par la suite être révélé, mis en lumière et transformé.
Causes - les produits inflammables
Les causes qui provoquent nos réactions, ou plus précisément, qui conditionnent la façon dont nous nous représentons les choses et par conséquent, provoquent nos réactions, sont multiples. La plus simple et facile à identifier, ce sont nos attentes qui, qu'elles soient satisfaites ou pas, provoquent des réactions en nous, plutôt agréables lorsqu'elles sont satisfaites et désagréables lorsqu'elles ne le sont pas.
Comment identifier les attentes qui se cachent derrière nos réactions ?
Les émotions pour identifier mes attentes
Les événements sont neutres. L'étiquette « positive » ou « négative » que l'on peut mettre sur une situation et sur l’émotion qu’elle provoque dépend de la perception de la personne qui la vit au moment où elle la vit. Une pluie d'été réjouira un agriculteur qui verra ses champs arrosés gratuitement, et la même pluie attristera un vacancier qui ne pourra pas profiter de la plage. Ce sont rigoureusement les mêmes gouttes de pluie, et pourtant, l’agriculteur et le vacancier ne réagissent pas de la même façon à leurs contacts. L’événement est neutre et provoque une réaction spécifique à chaque individu.
Si les émotions ne sont ni positives, ni négatives, elles sont en revanche clairement plus ou moins agréables et confortables. Elles sont surtout très utiles pour nous mettre en mouvement, et aussi, dans le cadre de ce processus de décryptage, pour nous aider à mettre en lumière ce qui ce passe en nous.
Qu’est ce qu’une émotion au juste ? De façon très synthétique, une émotion est une réaction provoquée par un déclencheur et qui se manifeste par des comportements.
On distingue différents types d’émotions : les émotions primaires, les émotions secondaires ou sociales (l’embarras, le mépris, la culpabilité, la jalousie), et les émotions combinées (la nostalgie, combinaison de joie et de tristesse). Les émotions primaires sont présentées dans le tableau ci-dessous.
L'obstacle est le déclencheur de la colère. Son comportement associé est l'attaque et s'accompagne de tension, points et dents serrés.
La perte est le déclencheur de la tristesse. Son comportement associé est le repli sur soi et s'accompagne d'épaules basses, de larmes, de pleurs.
Ce qui est toxique ou nuisible est le déclencheur de dégoût. Son comportement associé est le rejet et s'accompagne d'écoeurement, d'envie de cracher et de vomir.
La menace ou le danger est le déclencheur de la êur. Son comportement associé est la fuite et s'accompagne d'un rythme cardiaque qui s'accélère, sueurs froides, mains moites.
Le désir comblé est le déclencheur de la joie. Son comportement associé est l'ouverture, l'approche et s'accompagne de sourires, rires, dynamisme.
(tableau reproduit et enrichi à partir du livre Lâcher prise, comment se reconnecter à soi-même, éditions Robert Laffont)
Nous l’avons vu, un déclencheur n’est pas une cause. Une étincelle à elle seule n’explique pas la présence d’un feu. Il n’y a pas de feu sans produit inflammable, et le produit inflammable de nos émotions, ce sont nos attentes. C’est parce que l’agriculteur a besoin d’arroser son champ qu’il se réjouit de voir tomber la pluie. Et c’est parce que le touriste s'attend à passer la journée au bord de l’eau qu’il est déçu. Pour celui qui avait prévu de rester à la maison pour repeindre la cuisine, la pluie ne lui fait ni chaud, ni froid.
Une image vaut mille mots et nos émotions méritent bien un schéma pour illustrer leur fonctionnement. Nos feux émotionnels sont déclenchés par une étincelle qui allume un produit inflammable, nos attentes, ce qui provoque nos comportements. Nos émotions sont des signaux du tableau de bord de notre vie qui nous informent sur le niveau de satisfaction de nos attentes.
(schéma reproduit à partir du livre Lâcher prise, comment se reconnecter à soi-même, éditions Robert Laffont)
Ainsi, la cause de nos réactions émotionnelles, c’est la satisfaction ou la non-satisfaction de nos attentes, de nos désirs, de nos besoins. Chaque émotion a ses spécificités. De ces spécificités, nous allons avoir des indices pour savoir où orienter les projecteurs. Passons-les en revue :
La peur m’alerte d’une menace, d’un danger. Les questions à se poser lorsque l’on ressent de la peur sont :
Quel est le danger ? Quelle est la menace ? Le danger est-il réel ou fictif ? Qu’est-ce qui est en danger pour moi ? Menacé en moi ? Quels désirs, attentes et besoins risquent de ne plus être satisfaits si ce dont j’ai peur se produit ? De quoi ces attentes me parlent-elles ? Où prennent-elles racines ou que viennent-elles nourrir en moi ?
La colère se déclenche lorsqu’un obstacle s’interpose entre moi et la satisfaction d’une de mes attentes. Les questions à se poser lorsque l’on ressent de la colère sont :
Qu’y a-t-il derrière l’obstacle ? En quoi ai-je besoin de ce qu’il y a derrière l’obstacle ? Qu’est-ce qui est touché en moi si je ne l’obtiens pas ? De quoi ces attentes me parlent-elles ? Où prennent-elles racines en moi ? Que viennent-elles nourrir en moi ? Qu’est-ce qui risque de ne pas être nourri ou sécurisé en moi si je n’y accède pas ?
La tristesse m’alerte d’une perte, d’un manque. Les questions à se poser lorsque l’on ressent de la tristesse sont :
Qu’est-ce que j’ai perdu ? Qu’est-ce qui me manque ? Qu’est-ce qui m’a été enlevé et dont j’ai envie, besoin ? Qu’est-ce que cette envie ou ce besoin vient nourrir chez moi ? Qu’est-ce qui dans mon monde intérieur est affecté par le vide qui se manifeste à l’extérieur ? Qu’est-ce qui, en moi, est en manque suite à la perte ? Qu’est-ce qui, en moi, a besoin d’être nourri suite à la perte ?
Le dégoût me signale que quelque chose est toxique dans ce que je suis en train de vivre. Les questions à se poser lorsque l’on ressent du dégoût sont :
Qu’est-ce qui est toxique dans ce que je suis en train de vivre ? Qu’est-ce qui est menacé par la toxicité de ce qui se passe en ce moment ? Est-ce mon intégrité physique ? Ma sécurité ? Un projet qui me tient à coeur ? Est-ce relatif à ma vie personnelle ? Professionnelle ? De quoi le dégoût que je suis en train de ressentir me parle-t-il ? Qu’est-ce qui, en moi ou pour moi, est en danger “d’empoisonnement” ?
La joie m’alerte de la satisfaction d’une attente, d’un désir, d’un besoin. Les questions à se poser lorsque l’on ressent de la joie sont :
Qu’est-ce qui me rend joyeux ? Qu’est-ce qui est contenté, satisfait en moi ? Quels besoins sont nourris ? Un besoin de sécurité ? Une aspiration profonde ? Quelque chose qui me touche personnellement ou qui concerne quelqu’un d’autre ? Ma joie joie s’apparente-t-elle à du soulagement ? Si oui, de quel poids suis-je soulagé ?
La jalousie, la culpabilité et la honte sont riches d’enseignement sur soi-même. La culpabilité et la honte se ressemblent un peu, la culpabilité porte sur ce que l’on fait, la honte sur ce que l’on est.
Ces émotions ont la particularité de pouvoir être intrinsèques ou extrinsèques. Intrinsèques lorsqu'elles sont la combinaison de plusieurs émotions : de la peur et de la colère ou du dégoût pour la jalousie, et de la colère contre soi avec du dégoût ou de la tristesse pour la culpabilité et la honte. Elles sont extrinsèques lorsqu’elles relèvent d’héritages ou de conditionnements socioculturels ou éducationnels.
La jalousie culturellement conditionnée est considérée comme une preuve d’amour alors que c’est avant tout la marque d’un attachement et de la peur de perdre, aussi l’objet de notre attachement que la face, son honneur, sa dignité ou sa réputation. Être jaloux ne prouve pas que l’on aime une personne. Cela prouve que l’on y est attaché et que l’on a peur de la perdre.
La culpabilité et la honte peuvent être conditionnées ou héritées, ce qui fait se sentir coupable ou honteux dans des situations qui ne justifient pas une telle réaction. C’est comme si nous étions automatiquement coupable de quelque chose alors que rien, absolument rien dans ce qui se passe réellement, n’explique une telle réaction. Dans une version extrême, cela va jusqu’à se sentir coupable ou honteux d’exister. La vie est alors un mal-être permanent.
Pour en savoir plus sur les émotions et leur fonctionnement, rendez-vous sur le blog http://blog.benoitaymonier.fr, rubrique Intelligence émotionnelle.
Tirer le fil jusqu'au bout
Il convient dans ce processus de tirer le fil assez loin pour arriver là où il vous amène : à vous-même. Les questions clés sont :
Pour quelles raisons cela me touche-t-il autant ? Qu'est ce qui est touché en moi ? Comment ? En quoi ? Pour quelles raisons ?
Toutes les réponses qui parlent de quelque chose d'extérieur nous invite à tirer le fil plus loin, à nous reposer les questions en orientant les projecteurs à l'intérieur afin d'obtenir une réponse qui ne parle que de soi.
Une émotion peut en cacher une autre, tirer le fil permet de débusquer d’y voir plus clair dans ses réels besoins.
C'est en tirant le fil suffisamment loin que nous allons pouvoir mettre en lumière des éléments constitutifs de ce que nous sommes, à savoir nos blessures, nos peurs profondes, nos conditionnements, nos héritages, nos aspirations de vie.
Les blessures
Nous avons tous vécu, à un moment ou à un autre de notre vie, des expériences difficiles, douloureuses, voire traumatiques, qui nous ont blessé. Nous en gardons des traces plus ou moins profondes dans notre structure allant jusqu'aux peurs conditionnées. Nos blessures conditionnent nos représentations, nous rendant plus ou moins sensibles et réactifs à certaines situations. Les décryptages nous permettent donc de mettre en lumière les blessures que nous portons d'une part, et/ou les mécanismes de protection que nous avons développés d'autre part.
Ces grandes blessures sont selon moi au nombre de quatre : l'abandon, le rejet, la trahison et l'humiliation. Elles se réfèrent au comportement que certaines personnes de notre entourage ont eu à notre égard : ce sont elles qui nous ont abandonné, rejeté, trahi, humilié. Ces comportements appartiennent à l’autre, font partie du monde extérieur. Mais la blessure, elle, nous appartient, elle fait partie de notre monde intérieur. Voici un tableau illustrant ce qui se joue profondément en nous pour chacune de ces blessures :
(texte et tableau sur les blessures reproduit et adapté à partir du livre Lâcher prise, comment se reconnecter à soi-même, éditions Robert Laffont)
A cette liste nous pourrions ajouter la blessure d’abus qui se caractérise par le fait d'avoir été abusé physiquement, sexuellement et/ou psychologiquement par une autre personne, lorsque celle-ci nous a utilisé pour son confort – bien-être, plaisir, sécurité… – au détriment du nôtre et à l’encontre de notre volonté ou de nos aspirations profondes. Être abusé, c’est en quelque sorte un mélange de rejet, trahison, humiliation.
Face à chaque souffrance en général et à chaque blessure en particulier, nous avons des étincelles, des produits inflammables, et des mécanismes de protection pour nous sécuriser de ce qui peut raviver notre blessure et provoquer de la souffrance. Si chacun d’entre nous n’a pas forcément gardé de séquelles de ces blessures, il est cependant fort probable qu’à des âges et des degrés d’intensité différents, nous ayons fait l’expérience de chacune d’elles.
Au-delà de la guérison que nous sommes invité à faire lorsque nous prenons conscience d'une blessure, nous sommes surtout invité à nous libérer de la peur de souffrir et des mécanismes de protection que nous avons développés. Car au final, ce sont nos peurs et l'arsenal de réactions qui vont avec qui perturbent notre vie, qui conditionnent nos réactions, qui nous enferment derrière masques, boucliers, barricades ou château fort, et qui nous empêchent de vivre pleinement.
Nos mécanismes de survie ont la vertu de nous maintenir en vie. Cependant, ces mêmes mécanismes peuvent s'avérer être des prisons qui, paradoxalement, nous empêchent de vivre.
Vouloir une chose et son contraire, obtenir un résultat aux antipodes de ses attentes, réagir en total décalage avec la situation, les paradoxes ne manquent pas et nous y sommes tous, d’une façon ou d’une autre, confrontés plus ou moins fréquemment dans notre vie.
Vive les paradoxes !
Nos sur-réactions nous donnent de précieux indices sur ce qui, en nous, est particulièrement sensible. Nos réactions en général nous parlent de nous-même. Nos sur-réactions, voire nos réactions paradoxales, sont particulièrement parlantes.
Lorsque nous prenons mal une réflexion insignifiante, que nous nous vexons d’un comportement anodin, d’un regard ou de l’absence d’un regard, que nous déprimons au lieu d’être simplement déçu, il convient d’orienter les projecteurs à l’intérieur pour identifier ce qui nous fait sur-réagir.
En effet, lorsque nous sur-réagissons à un événement, le décalage entre notre réaction et une réaction proportionnée et adaptée à la situation nous indique que nous portons quelque-chose qui résonne avec la situation sans rien à voir avec elle. Cela nous parle de nous-même, et le décryptage de ces événements est particulièrement efficace pour mettre en lumière tel ou tel aspect de ce qui nous constitue, ce que nous portons, ce qui nous a construit.
Ces décalages peuvent aller jusqu’au paradoxe. Lorsque nous vivons un événement contradictoire, comme par exemple se trouver à vouloir littéralement une chose et son contraire ou à obtenir un résultat à l'opposé de ce qui était escompté, cette dé-coïncidence entre notre réalité subjective (nos représentations, nos attentes) et réalité objective (la façon dont les évènements se déroulent réellement : ce qui se passe et comment nous le vivons) nous donnent l’opportunité de faire des ajustements intérieurs. Ce qui a pour conséquence de corriger la façon dont nous produisons nos représentations de sorte qu'elles correspondent plus fidèlement au réel qu'elles représentent.
En science, ce sont les décalages entre prédictions issues des modèles théoriques (réalité subjective) et observations de la réalité objective, entre calculs et mesures, qui nous permettent de mettre en lumière des lacunes dans nos modèles, de les corriger, voir d'en changer complètement pour en adopter un qui rendra plus fidèlement compte du réel.
Les décryptages nous permettent non seulement d’identifier des décalages entre nos représentations et la réalité, mais rendent aussi possible la mise en lumière de la façon dont nous nous représentons les choses, de ce qui, dans notre structure, nous les fait nous les représenter de la sorte. Autrement dit, les décryptages nous aident à mettre en lumière ce que nous sommes, ce qui, par conséquent, nous donne l'opportunité de nous transformer profondément, à la racine même de ce qui nous constitue.
Les conditionnements
Les décryptages aident efficacement à mieux se connaître sur tous les aspects de ce qui nous constitue, et en particulier sur les conditionnements qui nous ont modelés. Qu'ils émanent de notre éducation, environnement socioculturel, familiale, ou qu'ils résultent de nos mécanismes internes de construction, de développement, ou de protection, nos conditionnements participent à la façon dont nous créons nos représentations. Par conséquent, ils influencent considérablement notre façon de réagir et d'interagir avec les autres et notre environnement. Et c’est tant mieux, puisque c’est justement par l’observation de nos réactions et comportements que nous allons pouvoir mettre en lumière ce qui nous constitue.
“Les hommes se trompent en ce qu'ils pensent être libres et cette opinion consiste en cela seul qu'ils sont conscients de leurs actions, et ignorants des causes par lesquelles ils sont déterminés.”
Baruch Spinoza
Autrement dit, nous nous croyons libres parce que nous sommes conscient de nos désirs, de nos actions et de nos réactions, mais ignorant de ce qui les déclenche ou ce qui les nourrit.
Qu’est ce que la liberté ? Sommes nous libres ? Sommes-nous déterminés ou avons-nous un libre arbitre ? Toutes ces questions font aujourd’hui l’objet de nombreux débats tant philosophiques que scientifiques.
Sans rentrer dans ces débats fort intéressants, nous pouvons à ce stade du livre raisonnablement considérer que tant que nous ne savons pas ce qui est à la racine de nos désirs, réactions, comportements, nous sommes dans l'illusion de la liberté.
Parmi les choses qui nous font avoir tel désir plutôt qu'un autre, il y a sans conteste nos conditionnements socio-culturels. Nous sommes des sujets sociaux. Nous faisons tous partie d'un corps social et nous sommes très largement déterminés par ce corps social.
Par exemple, l’humour est universel. Où qu’ils soient sur la planète, les êtres humains ont de l’humour et rient. Mais selon leur culture, il est indiscutable qu’ils ne rient pas tous des mêmes choses. De célèbres caricatures ont d’ailleurs tristement défrayé la chronique avec en 2015 le drame de la tuerie dans les locaux de l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo.
Voici quelques exemples de conditionnements mis en lumière par des décryptages :
De la façon dont nous nous brossons les dents (ou pas) à celle dont nous nous comportons à la maison, dans la rue, avec nos amis, au travail, nos conditionnements conditionnent (c’est le cas de le dire) nos comportements. Pour reprendre la télécommande de son existence et ne pas être inconsciemment gouverné par ceux-ci, il nous appartient de les mettre en lumière, et de décider en conscience de les garder intacts, de les renforcer ou de s’en libérer.
Les héritages
Ce que nous portons en héritage est d’origine très variée, aussi bien de nos proches, de nos ancêtres récents, plus anciens, voire très lointains.
Selon la psychologie évolutionniste, nous avons tous hérité d’une tendance à interpréter les stimuli ambiguës comme potentiellement dangereux plutôt que neutre ou bénéfique. En effet, nous sommes les descendants d’homo sapiens sapiens qui ont systématiquement pris leurs jambes à leur coup à chaque bruit suspect du feuillage, même si celui-ci était provoqué par une bourrasque de vent. Nous sommes les descendants de ceux qui ont eu peur du fait de cette interprétation. Pour les autres, ils n’ont peut-être pas couru pour rien dans de nombreuses situations inoffensives, mais il a suffi d’une fois pour qu’ils se fassent manger par un prédateur. Ils ont donc eu moins de descendance que les peureux. Nous avons donc hérité d’un mécanisme de vigilance activant des réactions de stress à la moindre menace nous permettant de nous mettre en sécurité.
Dans notre monde civilisé (quoique) dans lequel certains dangers n'existent pour ainsi dire plus (se faire manger par un prédateur affamé par exemple), il convient de prendre du recul par rapport à nos peurs et de veiller à ce que celles-ci nous parlent d’un danger réel. Ne pas faire cette vérification nous expose à souffrir de troubles anxieux. Il convient de garder le bénéfice du signal d’alarme qu’est la peur sans en subir les effets toxiques que sont l’angoisse et l’anxiété. Le décryptage est dans cette perspective particulièrement efficace.
Les héritages sont subtiles et difficiles à mettre en lumière. Cela nécessite de la vigilance et une grande assiduité à l’exercice pour que des recoupements puissent se faire et déceler ainsi dans nos réactions les éléments de réalité qui vont permettre de mettre en lumière de façon fiable ce que nous portons en héritage.
La récurrence de certains comportements doit nous mettre la puce à l’oreille. D’autant plus lorsque l’on reconnaît dans ceux-ci des caractéristiques que l’on a identifiées chez nos proches. Je réponds au téléphone exactement comme le fait mon frère aîné. Je fais les mêmes papouilles à ma nièce que celles que ma grand-mère me faisait. J’ai souvent peur de manquer même si je n’ai jamais manqué de rien, contrairement à mes parents et grands-parents qui ont traversé des périodes troublées et ponctuées de pénuries. Mon père battait ma mère, je bats ma femme. Ma mère était battue par son mari, je le suis également. Mon grand-père était alcoolique, je le suis aussi. Je coupe souvent la parole de mon compagnon, ce que mon père fait constamment depuis aussi loin que je puisse me souvenir. Je constate que je parle fort alors que je ne supportais pas cette façon de faire de la part de mon père. Je fais le même travail que mon père et que mon grand-père. Ou au contraire, j’ai une forte aversion pour le travail que faisait mon père ou mon grand-père.
Tout comme les conditionnements socio-culturels, ce que nous portons en héritage se manifeste en nous aussi bien en adhésion qu’en aversion à ceux-ci.
Nos héritages peuvent aussi être décelés de façon fortuite grâce à une coïncidence frappante ou un lapsus.
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Ce que nous mettons en lumière de ce qui nous constitue, de ce qui nous a construit, de ce que nous sommes, est en soi une nourriture que nous prenons de l'expérience que nous traversons d'une part, ce qui parfois nous invite à nous aligner et à nous positionner différemment d'autre part.
Nourriture et justesse profonde
Qu'entend-on par "nourriture" dans ce processus ? Ce sont les prises de conscience, la mise en lumière de quelque chose en soi, l'identification de ce qui nous appartient ou pas, de ce qui est réel ou illusoire, de ses aspirations profondes ou de ses blocages. Faire l’expérience de sa propre existence en étant au contact conscient de soi-même est en soi une nourriture.
Si la nourriture correspond aux prises de conscience suscitées par le décryptage, la justesse profonde, quant à elle, relève de l'alignement et du positionnement qui en découlent.
Les décryptages sont sources de prises de conscience majeures et de spectaculaires transformations dans la vie de ceux qui les pratiquent assidûment, d’autant plus spectaculaires qu’elles débloquent des situations auxquelles on a consacré, durant parfois des années, beaucoup d’énergie sans résultats satisfaisants.
En effet, dans l’exemple précédent, Louisa a passé la plupart de son existence à essayer de composer avec les autres et l’environnement en s’oubliant systématiquement. Problèmes de santé, dépression et anxiété ont affecté Louisa de façon chronique sans pouvoir y remédier de façon durable. Les décryptages lui ont permis de mettre en lumière ce qui, durant toutes ces années, a enclenché des mécanismes de protection qui l’ont enfermé et amené à ne pas se considérer. Louisa a ainsi pu commencer à identifier ses besoins, ses attentes, ce qui est profondément essentiel pour elle, et prendre les commandes de son existence différemment.
Quand Catherine a commencé à mettre le doigt sur ce qui, toute sa vie, lui a rendu très difficile la prise de décision de voyager pour quitter ou venir voir ses parents, elle a cessé de passer plusieurs jours à stresser et à changer sans cesse d’avis pour prendre ses billets d’avion.
Quand elle a mis en lumière qu’elle portait un lourd poids de culpabilité vis-à-vis de sa mère, puis qu’elle a réalisé qu’elle n’était pas responsable de ses dépressions chroniques, Agnès a pu assainir une relation tumultueuse, empreinte de stress, de manipulations et de rancoeur.
Après avoir contacté ce qui, hérité de son père, alimentait et intensifiait ses colères lorsque sa compagne Léa lui coupait la parole, François n’a plus jamais pété les plombs comme ce fut régulièrement le cas.
Apprendre ou se nourrir ?
Ces transformations spectaculaires amènent certaines personnes à les justifier par l’apprentissage qu’ils font de vivre leur vie différemment. Si effectivement apprendre et développer des compétences nous permet de changer des choses dans sa vie, les transformations qui découlent des mises en lumières faites lors de décryptages ne relèvent pas d’un processus d’apprentissage. C’est la raison pour laquelle je parle de nourriture.
En effet, je préfère le terme nourriture à celui d'apprentissage car être ce que l’on est, ce n’est pas quelque chose qui s’apprend. On apprend à nager, à faire du vélo, à lire, à compter, mais pas à être. La connaissance de soi, c’est quelque chose qui se découvre, et parfois, qui se dé-couvre au sens d’enlever le voile qui couvre ce qui nous empêche d’accéder à ce que l’on est. En revanche, on peut dire que l’on apprend à faire ce qui permet de mieux se connaître. En effet, on peut apprendre à être plus présent et plus conscient, à faire la part des choses, à orienter les projecteurs à l’intérieur de soi, à faire des décryptages. On peut apprendre des façons de faire, une pratique, une discipline, une routine qui aide à mieux se connaître. On apprend la méthode, mais se connaître fondamentalement, cela ne s'apprend pas, cela se découvre au fil des expériences que nous faisons tout au long de notre existence.
C'est à la lumière de tout ce travail de décryptage que nous pouvons, de façon ancrée dans le réel, nous positionner, faire des choix, prendre des décisions, en un mot vivre notre vie un peu plus en lien et en accord avec soi-même.
Nous voilà outillé pour, à la lumière de ce que nous vivons, identifier les éléments de réalité de ce que nous sommes et faire coïncider un peu mieux les représentations que nous avons de nous-même avec la réalité de ce qui nous constitue, de ce qui nous a construit, de ce que nous portons, en un mot, de ce que nous sommes réellement. Avoir une attention juste à ce que l'on est permet de faire des choix éclairés, plus centrés, ancrés dans son essence et alignés à ce qui est profondément essentiel pour soi.
Nous faisons partie d’un corps social, en interaction permanente avec les autres. La question qui se pose maintenant est : Comment se connecter aux autres ?
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